La question éternelle posée à notre humanité est celle du mal. Il reste pour nous un scandale, en sachant qu’étymologiquement, le scandale, skandalon en grec, est le caillou sur lequel on bute et qui nous fait tomber.
L’évangile ne propose pas une théorie sur le mal, il ne nous apporte pas une explication, en revanche il ne l’ignore pas. Il raconte que le Christ, celui qui a été appelé Parole de Dieu, fils de Dieu, Seigneur et sauveur du monde, celui-là a été condamné, broyé, crucifié, écrasé par les forces du mal.
Ce fait singularise le christianisme quand on le compare avec les autres religions.
Selon la tradition, Moïse est mort face à la terre promise, à l’âge de cent vingt ans, sans que sa vue se soit brouillée ni que sa vigueur ait diminué.
Le Bouddha est décédé à quatre-vingts ans, au milieu de ses disciples, après avoir réuni une grande communauté de moines et de moniales.
Confucius, revenu vers la fin de sa vie à Lou d’où il avait été chassé, s’éteint après s’être consacré à la formation d’un groupe de disciples et à la rédaction de son enseignement.
Mahomet, enfin, après avoir savouré les dernières années de sa vie comme chef politique de l’Arabie, meurt dans son harem, dans les bras de sa favorite.
Jésus est mort jeune, condamné par les Romains, trahi et renié par ses disciples, abandonné par les religieux de son temps. Il meurt d’un supplice qui reste parmi les plus barbares que la cruauté des hommes ait inventé.
La croix est la réponse que Dieu a apportée à l’énigme du mal. Au lieu de supprimer ses ennemis, il a préféré se laisser crucifier.
Cette logique paradoxale a accompagné les premiers chrétiens. À travers les luttes, les dangers et les souffrances, ils ont vécu dans l’assurance que Dieu partageait leur chemin. La croix était un scandale, elle est devenue une expérience de salut ; elle était un signe d’abandon, elle est devenue le signe d’une présence dans l’épreuve ; elle était un signe de malédiction, elle est devenue la marque de leur foi.