Ne vous souciez pas du lendemain

Face aux peurs, Véronique Mégnin, équipière de la Frat’Aire « Pays de Montbéliard » plaide pour l’accueil de la nature et de la Fraternité.

Pendant les deux derniers mois, comme tous les équipiers, pasteurs ou directeurs de la Mission populaire, j’ai passé beaucoup de temps, chaque jour, à appeler bénévoles et participants fréquentant la Frat. Combien de fois ai-je entendu cette expression dans les propos échangés avec les uns et les autres : « ça fait peur, tout ça ! ». Expression formulée ainsi ou avec d’autres mots : « Ca craint ! », « j’ai peur ! », « Qu’est ce qu’on va devenir ! »,  « On est foutu ! », « C’est le début de la fin ! ».

Cette peur s’est exprimée pour plusieurs raisons. Peur de la maladie en soit et peur de la mort, de celle des proches ou de notre propre mort. Mais aussi peur du complot, peur de l’après crise sanitaire avec la crise économique qui s’en suivra, peur de la fin de notre mode de vie et peur de la fin du monde tout court, voir même peur que ce virus soit une attaque d’extraterrestres… Oui, j’ai tout entendu.

Face à cette peur, les réactions ont été elles aussi variés : Certains ont appliqué scrupuleusement les recommandations et les gestes barrières tout en continuant parfois à sortir parce qu’obligé par leur travail, mais en ayant en permanence la peur au ventre. Il y a ceux qui se sont murés dans leur appartement, se coupant de tout lien et parfois même allant jusqu’à ne plus appeler au téléphone ou ne plus regarder leurs mails pour ne pas à avoir à parler de ce qui se vivait en dehors ou ceux qui à l’inverse ont appelé chaque jour pour exprimer cette peur ou ont envahi nos boites mail de messages angoissés.

Que dire ? Que faire face à cette peur justifiée de la maladie qui a frappé, pour chacun de nous des connaissances, des proches, des frères en l’humanité, des frères en Christ ?

Peut-être trouver les justes paroles de réconfort. Dans ces paroles que j’ai essayé d’apporter, chaque fois que j’ai tenté de redonner un peu espérance à ceux qui se sentaient mal et je me rends compte que j’ai très souvent parlé de la nature. Non ! Je n’ai pas détourné la conversation en parlant de la pluie et du beau temps, mais j’ai évoqué la beauté de ce que nous donne chaque jour la création. Dans ce printemps confiné, j’ai appelé chacun à contempler ce qui l’entourait : les feuilles des arbres et les fleurs qui commençaient à éclore, les chants des oiseaux s’affairant à construire leurs nids pour leurs petits, le calme de la nuit, la lueur de la lune et des étoiles, la pureté du ciel bleu moins pollué par les avions, les voitures et l’activité industrielle et même à savoir regarder les animaux, petits et grands qui ont commencé à se montrer jusque dans nos villes parfois. J’ai parlé de la nature, du cycle de la vie, de cette vie extraordinaire plus forte que la mort. J’ai parlé de la contemplation du jardin, à commencer par de celui que certains se sont mis à cultiver en pleine terre ou jusque sur leurs rebords de fenêtres et de celui que Dieu nous a confié. J’ai parlé de la confiance que nous nous devons d’avoir en Dieu et surtout dit que notre crainte ne nous apportera rien de plus, « n’ajoutera pas une coudée à la longueur nos vies », alors qu’il nous fallait maintenant chercher ensemble à faire avec nos frères et sœurs « le royaume de Dieu ».

Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice.

Depuis toujours le texte de l’Evangile de Luc Chapitre 12, les versets 22 à 31 ou sa variante dans Matthieu au chapitre 6 les versets 25 à 34, ont inspiré ma vie.

22 Jésus ajouta, en s’adressant à ses disciples : C’est pourquoi je vous dis : ne vous inquiétez pas en vous demandant : Qu’allons-nous manger ? Avec quoi allons-nous-nous habiller ? 23 La vie vaut bien plus que la nourriture. Le corps vaut bien plus que le vêtement.

24 Considérez les oiseaux, ils ne sèment ni ne moissonnent ; ils n’ont ni cave, ni grenier et Dieu les nourrit. Vous valez bien plus qu’eux ! 25 D’ailleurs, qui de vous peut, à force d’inquiétude, prolonger son existence, ne serait-ce que de quelques instants[a] ? 26 Si donc vous n’avez aucun pouvoir sur ces petites choses, pourquoi vous inquiétez-vous au sujet des autres ? 27 Considérez les lis ! Ils poussent sans se fatiguer à tisser[b] des vêtements. Et pourtant, je vous l’assure, le roi Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n’a jamais été aussi bien vêtu que l’un d’eux ! 28 Si Dieu habille ainsi cette petite plante dans les champs, qui est là aujourd’hui et qui demain déjà sera jetée au feu, à combien plus forte raison vous vêtira-t-il vous-mêmes ! Ah, votre foi est bien petite !

29 Ne vous faites donc pas de soucis au sujet du manger et du boire, et ne vous tourmentez pas pour cela. 30 Toutes ces choses, les païens de ce monde s’en préoccupent sans cesse. Mais votre Père sait que vous en avez besoin. 31 Faites donc plutôt du royaume de Dieu votre préoccupation première, et ces choses vous seront données en plus.

Nous voudrions bien être comme l’oiseau du ciel qui ne se préoccupe pas de sa nourriture ou comme être comme le lys des champs qui ne se soucie pas de quoi il sera vêtu. Mais nous savons la misère, l’isolement social, la détresse, la maladie, la discrimination, alors cela devient moins facile de penser qu’il nous faut juste cherchez le royaume de Dieu pour que toute chose nous soit donnée en plus.

Pourtant, dans ce temps entre parenthèse que nous vivons encore, beaucoup ont fait le tri dans leur vie autant que dans leurs placards. Chacun a fait la part des choses pour ne faire ressortir que ce qui lui semblaient essentiel et souvent ce qui lui avait le plus manqué. Bien sur, ce sont en priorité nos proches, familles, amis qui nous ont manqué et qu’il nous tarde tant de pouvoir retrouver sans risque. Mais il suffit d’écouter combien chacun revendique son droit d’aller dans les jardins, les parcs ou de marcher sur une plage, pour comprendre que ce besoin de nature nous est devenu primordial. Oui, je sais ce n’est pas la priorité de tous, au vu des files d’attente pour le retour au fast food dès leurs réouvertures. Mais, globalement beaucoup disent aujourd’hui vouloir prendre plus de temps pour jardiner, se promener, contempler ce que nous donne la nature. J’ose espérer que chacun s’efforcera aussi à plus la respecter.

Et puis, il y a eu tous ces temps entre voisins de balcons à fenêtres, à applaudir les soignants ou ceux qui travaillaient pour que continue la vie. Ceux qui ont chanté, joué de la musique, dansé…Ceux qui ont fait des courses pour leurs voisins, ceux qui les ont appelé, pris des nouvelles. Nous avons tous redécouvert ainsi des frères ignorés et pourtant si proches.

Et puis, je terminerai en parlant de ceux qui ont cousu et offert des masques par centaine pour protéger les autres : « combien à plus forte raison, ne vous vêtira t’il pas lui-même ». Ceux qui ont semé des graines, fait des plants de tomates, de courges, de concombre, de fleurs et de fruits qui se sont mis spontanément à les partager avec leurs voisins : « ne vous faites pas du soucis au sujet du manger et du boire ».

De cette peur bien présente en chacun de nous, émerge aussi un réel élan d’humanité pour nos semblables et c’est certainement ainsi que commence le royaume de Dieu, par l’amour que nous nous portons les uns au autres.

Ne vous tourmentez pas et cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice et toute chose vous seront données en plus.

Véronique Mégnin, équipière de la Frat’Aire « Pays de Montbéliard »

Le dessin est extrait de la page Facebook de Pierre Hédrich, Un dessin par jour pour raconter la crise sanitaire.

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