En chemins

Chaque année, de plus en plus de marcheurs et marcheuses choisissent de partir « en chemins », loin du tumulte des plages bondées et du tourisme de masse. Randonnée, écologie, quête de sens… Des aventures estivales qui nous invitent à réfléchir à ce que signifie vraiment « marcher léger ».

Dès les beaux jours, de mai à octobre, sac au dos et bâton en main, ils ont été des centaines de milliers à pratiquer la randonnée itinérante. Une certaine lassitude du tourisme balnéaire et une motivation grandissante pour des loisirs plus écologiques a poussé tout un peuple majoritairement de jeunes retraité·es mais pas que, de sportifs, de familles, de femmes seules ou en groupe à se lancer dans l’aventure d’une ou plusieurs semaines de marche. Le réseau des sentiers de Saint-Jacques de Compostelle, le GR 34 longeant l’intégralité des côtes bretonnes, le chemin de Stevenson (popularisé par le charmant film « Antoinette dans les Cévennes ») sont devenus des lieux majeurs d’un écotourisme en plein essor. Et nul doute qu’on y croise des bénévoles œuvrant dans les Fraternités de la Miss Pop…

Certes les conditions offertes ménagent l’endurance des marcheurs : de nombreux hébergements proposent le gîte et le couvert à des prix variés et il est possible sur les itinéraires les plus courus de se faire porter ses bagages à chaque étape. Mais un nombre significatif de randonneurs choisissent de jouer le jeu d’une sobriété plus poussée en portant leur propre ravitaillement et en bivouaquant.

Ce faisant, ils retrouvent des gestes depuis longtemps oubliés dans notre société de consommation et d’abondance immédiates : se repérer dans un paysage inédit, sans toujours l’aide des réseaux de géolocalisation, trouver de l’eau, des points de ravitaillement, des lieux où dormir en toute sécurité, sans oublier la satisfaction de besoins naturels sans eau et en pleine nature. Mais ces ascètes volontaires d’un été ont-ils toujours conscience que ce qu’ils vivent alors est le quotidien des gens de la rue, SDF ou précaires qui survivent dans nos cités?

Il n’est pas indifférent que certains sentiers reprennent les itinéraires de pèlerinage qui jalonnaient l’Europe médiévale. Aujourd’hui, la motivation religieuse des randonneurs qui accrochent une coquille Saint-Jacques sur leur sac est minoritaire, bien que réelle. Mais peut-on imaginer de façon « catho-laïque » que ce retour aux sources et ce choix d’une sobriété à l’opposé du consumérisme habituel fassent inconsciemment écho aux vertus expiatrices et rédemptrices des pèlerinages d’antan ?

Photo : Sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle © Dominique Bacquet