Jonas est un drôle de personnage. Lorsque Dieu l’appelle pour l’envoyer à Ninive, il fuit sur un bateau pour échapper à sa vocation. Il est rattrapé par une tempête, jeté à l’eau et mangé par un grand poisson. Lorsque de dernier le recrache, il finit par répondre à l’appel de Dieu et va à Ninive pour prêcher la destruction de la ville : « Encore quarante jours et Ninive sera détruite ». Contre toute attente, les habitants de la grande ville, depuis le roi jusqu’aux animaux domestiques, reviennent de leur mauvais comportement ce qui suscite le pardon de Dieu.
Le récit a été mis par écrit à une époque où la ville de Ninive avait disparu depuis longtemps ce qui lui confère une valeur universelle. Le récit ressemble plus à un conte oriental qu’à un livre prophétique. Le décalage est d’autant plus marqué que le message du livre – Dieu fait miséricorde aux Ninivites qui se sont repentis – est l’inverse de celui du personnage éponyme qui, dans le dernier chapitre, attend avec impatience que Dieu fasse descendre son feu sur la ville pécheresse. Avec humour, le récit se moque du prophète nationaliste qui proteste contre un Dieu qui est compatissant avec les ennemis de son peuple.
Le livre joue sur le contre-pied puisqu’il évoque des marins étrangers et des Ninivites qui se convertissent alors que le prophète d’Israël reste enfermé dans ses ornières religieuses. Il montre un Dieu qui a plus d’imagination que ses serviteurs en faisant intervenir une tempête, un grand poisson, une plante mystérieuse et un petit ver pour convaincre son prophète et le conduire à la justice.
Entre le conte et la parabole, le livre de Jonas occupe une place importante dans la tradition. Dans le judaïsme, il est lu tous les ans lors de la célébration de Kippour puisqu’il souligne l’importance de la repentance à laquelle répond le pardon de Dieu. Dans le Nouveau Testament, Jésus a invoqué le signe de Jonas pour évoquer son ministère. Comme Jonas, l’Évangile est une invitation à proclamer le pardon de Dieu jusqu’aux extrémités de la terre.