Nous oublions souvent qu’Orléans était considérée, au milieu du 16ème siècle, comme la capitale du protestantisme français. La ville était même surnommée « Nouvelle Genève. » L’eau a coulé sous les ponts depuis ce qui n’empêche pas l’Eglise protestante unie d’Orléans de se montrer très active et soucieuse de répondre aux attentes d’une communauté diversifiée.
Si l’histoire d’Orléans reste liée à celle de Jeanne d’Arc galvanisant les troupes pour libérer la ville des Anglais en 1431, celle de l’Orléanais en tant que l’un des berceaux du protestantisme français est, en revanche, beaucoup moins connue. Et pourtant : « Héritière d’un long passé, l’Église Réformée d’Orléans se manifeste très tôt. Dès 1524, un arrêt du Parlement de Paris ordonne une enquête sur les propagateurs des doctrines de Luther dans la ville d’Orléans », rappelle Gracieuse Moulin, présidente de Mémoire Protestante en Orléanais (1). L’Orléanais s’avère, en effet, très tôt conquis par les idées humanistes et l’influence de Luther. La célèbre université de droit d’Orléans faisait partie des lieux où se déployait les idées nouvelles de l’’humanisme et du luthéranisme. Une université fréquentée, entre autres, par Pierre-Robert Olivétan, Calvin (arrivé à 19 ans en 1528 pour étudier le droit) et de nombreux étudiants germaniques gagnés au luthéranisme. A cette même époque, le luthérien Melchior Wolmar, professeur du jeune Théodore de Bèze, dispensa aussi son enseignement auprès de Calvin. (2) « La Réforme a ainsi vite progressé dans la région : cinq pasteurs en 1559 et des cultes rassemblant parfois des milliers de personnes », précise Gracieuse Moulin. En 1562, La ville accueille le 3ème synode national. La ville sera, du reste, au cœur des trois premières guerres de religion (un millier de victimes à la Saint Barthélémy). En 1599, le premier temple protestant est construit à Bionne près d’Orléans. Ceci expliquant cela, après la révocation de l’Edit de Nantes, la foi protestante restera bien vivante dans l’Orléanais, notamment dans les campagnes. Ainsi, moins de 50 ans après l’Edit de Tolérance de 1787, un temple sera construit à Orléans en 1835 et inauguré quatre ans plus tard. L’un des rares temples protestants ronds dans l’Hexagone, fier de représenter encore aujourd’hui l’Eglise protestante unie de France (3). Sur la même place, tout près de là, la statue de Jean Calvin, érigée en 2009, veille.
Répondre à la diversité des paroissiens
Les protestants sont minoritaires en cette région, mais ils sont dynamiques. « Nous accueillons de 350 à 400 foyers. De 80 à 100 personnes viennent au culte le dimanche, raconte Agnès Lefranc, pasteur de l’Église protestante unie d’Orléans depuis 2016. Les profils des paroissiens sont de plus en plus diversifiés avec moins de protestants de souche et plus de personnes d’origine catholique ou sans éducation religieuse mais en recherche. Nos paroissiens sont aussi souvent issus de l’immigration. Ces histoires différentes favorisent des attentes multiples. C’est pourquoi, nous cherchons à diversifier nos propositions en nous appuyant sur des cultes exprimant cette diversité. » Le nouveau livret de spontanés constitue un bon exemple de cette démarche. La nouvelle version propose des spontanés pour tous temps dans des styles différents : psaumes, chorals luthériens, chants du Réveil et deux compilations de chants pour jeunes. « Nous rassemblons ainsi, au sein d’un même recueil, nos différentes réalités. La musique, ne l’oublions pas, reste un lien sensible et rassembleur », apprécie à sa juste valeur Agnès Lefranc, violoncelliste de profession dans une vie antérieure.
L’Église protestante d’Orléans a, par ailleurs, mis en place un Parcours Découverte, de sept séances, destiné à tous ceux qui s’intéressent ou souhaitent rejoindre la communauté. Des personnes à l’image de la diversité actuelle, d’origine catholique, sans culture religieuse, des jeunes retraités d’origine protestante mais athées, enfin des jeunes adultes qui cheminent vers le baptême. Des séances qui rassemblent entre 20 et 25 personnes. Confinement oblige, les dernières séances se sont déroulées par visioconférence. Cette ouverture aux autres se manifeste également pendant l’Avent. En décembre dernier, tous les soirs au temple, du 1er au 24 à 19h ou 17h, se déroulait une heure de rencontre et de partage pour tous : « des cultes pour tous les âges, des Noëls du monde, des concerts, des thèmes de société … autour d’un fil rouge, celui de la lumière », annonce le dépliant. Au final, un franc succès avec une moyenne de 66 personnes par soirée et de nombreuses personnes venues de l’extérieur, dont certaines se sont par la suite inscrites au Parcours Découverte. Une lettre hebdomadaire envoyée par courriel renforce ce lien, notamment en cette période de restriction tant au niveau des cultes que des réunions. Au sommaire, médiations bibliques, annonces des cultes sur RCF, vidéoconférences, diffusion d’articles de réflexion …
La jeunesse tient une place importante dans la vie de la paroisse. Ils sont une bonne centaine, de l’Eveil biblique aux étudiants. En 2017, la paroisse a organisé un événement « un peu fou » aux dires de notre pasteure. En l’occurrence une marche œcuménique de nuit, en Sologne. Une marche longue de 26 km en cinq étapes, d’église en église. Animation à l’appui. « Nous étions une centaine à marcher dont environ 70 jeunes et un encadrement évidemment très important. Un très beau souvenir, car ce fut un moment fort. Les jeunes nous en redemandent, nous y réfléchissons mais d’un point de vue logistique cela nécessite une énorme organisation », reconnaît Agnès Lefranc qui n’a pas dit son dernier mot.
Marie Piat
(1) Mémoire Protestante en Orléans. www.memoprotestantorleans.org
(2) Calvin resta à Orléans de 1528 à1533, mis à part une année à Bourges.
(3) Église protestante unie d’Orléans : 2 Cloître Saint-Pierre Empont – 45000 Orléans. 02 38 53 72 71. www.epudf-orleans.org