Des aumôniers de prison et de personnes détenues témoignent sur l’action de l’Evangile dans la vie de personnes incarcérées.
Questions de vie
« J’ai grandi sans avoir aucune éducation religieuse mais je sens depuis quelque temps qu’il y a quelque chose et j’aimerais savoir… »
« J’ai fait ma communion mais j’ai rien compris alors j’ai laissé tomber. Mais pourquoi croire ? »
« Je suis musulman et j’aimerais vous poser quelques questions sur votre religion »
« Je crois qu’il y a un Dieu mais quelle religion m’aidera à le connaître ? »
« S’il existe, pourquoi il m’aide pas ? »
« Vous croyez qu’il peut m’aider ? »
Voilà quelques unes des phrases d’invitation à la discussion qui sont lancées aux aumôniers au détour d’un escalier, d’une coursive ou d’une cellule, et qui dénotent une soif de connaître le vrai Dieu, pas celui qu’on leur a présenté comme un tyran vengeur, un père fouettard ou encore comme un « bon Dieu » débonnaire, barbu, vieux, inintéressant, voyant le monde et ses habitants de très loin.
Derrière ces questions, il y a une véritable recherche de quelqu’un de fiable sur lequel on peut s’appuyer dans ce monde carcéral où tout est fluctuant en fonction du bon vouloir de l’un ou de l’autre. Ici, on ne peut faire confiance à personne ; la trahison et la violence sont monnaie courante. Ces détenus ne recherchent pas une religion, un opium du peuple, mais quelque chose, quelqu’un, qui va pouvoir les aider à rester debout malgré les vicissitudes de la vie ou le poids de la culpabilité. Alors les discussions qui s’ensuivent sont souvent empreintes d’une grande sincérité : du fait de la prison, le vernis social a éclaté, on peut aller au fond des choses beaucoup plus facilement. Et Dieu répond très concrètement (même dans une prison) lorsqu’on est vrai devant lui.
Cela me fait penser au passage de la Bible dans Jean 7 v 37 lorsque Jésus dit : « Que celui qui a soif vienne à moi et qu’il boive ». C’est simple et efficace.
Avons-nous encore soif ou sommes-nous déjà complètement désaltérés ?
Heureux ceux qui cherchent
Jean est là depuis quelques mois. Quinquagénaire débrouillard, « self made man », il vivait à cent à l’heure pour son travail, ne comptant ni ses heures, ni ses efforts, ni les kilomètres pour y arriver. Et puis un jour, l’arrêt brutal : le passage à la case prison. « Je me suis retrouvé ici, entre 4 murs, sans échappatoire. J’ai cru que je devenais fou ! ». Rester inactif alors qu’il y avait tellement de choses à régler dehors. Jean ne supportait pas ce qu’il considérait comme une injustice : le priver de son travail. Tout ce qui faisait sa personne, le fruit de son labeur, tout était dehors et lui dedans.
Lorsque je l’ai rencontré, plusieurs mois après son arrivée Jean était en plein questionnement sur le sens de la vie, de sa vie. Il posait beaucoup de questions, il cherchait dans toutes les directions, il creusait, il fouinait dans les livres, dans la Bible, à la ciberbase, à la messe puis au groupe de partage. Jean a reçu beaucoup de réponses pas toujours celles qu’il attendait et il continue à chercher. Mais il a eu une réponse qui s’est imposée à lui un soir, seul dans sa cellule : « Maintenant je sais pourquoi je suis ici, j’ai été arrêté dans ma course folle de « l’avoir » afin que je puisse « être » simplement. Et de dire sa conviction toute fraîche que nous ne sommes pas sur terre par hasard et que Dieu a à voir quelque chose dans l’affaire. « Il m’a fallu du temps pour comprendre. Avec ce cheminement que j’ai pu faire, je me dis que maintenant, ici en prison je me sens plus libre que dehors auparavant ».
Il y a parfois des chemins sinueux, compliqués, dont on ne voit pas au premier abord le sens et la direction mais qui nous permettent de trouver ce qui fait l’essence de notre existence. Heureux celui qui se met en route pour chercher, il trouvera.
« Vous me chercherez et vous me trouverez car vous me chercherez de tout votre cœur » Jérémie 29 v 13.