Condamnée à vivre (2ème partie)

Cet enfant, c’était moi.

Cet aumônier, c’est moi.

Qui aurait imaginé que je remplirai un jour cette fonction d’aumônier et qui plus est, dans un tel lieu que le Centre Pénitentiaire ? Peu de personnes ont cru à cet appel et pourtant, quand je regarde en arrière, je m’aperçois que notre si bon Seigneur avait tout préparé et m’équipait depuis de longues années. C’est Lui qui me revêt de cette nouvelle identité !

En effet, dès l’enfance, j’étais la confidente de bon nombre de camarades en souffrances et en proie avec de lourdes problématiques familiales. Au collège, j’étais élue déléguée parce que je savais « écouter sans juger » et qu’on pouvait me « faire confiance » et que je comprenais toutes ces douleurs partagées.  Cette fonction de déléguée ne m’a pas quittée au lycée… Camarades comme professeurs soulignaient mon sourire réconfortant que je dessinais largement. J’avais appris, très jeune, qu’ « un sourire ne coûte rien mais qu’il produit beaucoup ! Il enrichit celui qui le reçoit sans appauvrir celui qui le donne. Il ne dure qu’un instant, mais son souvenir est parfois éternel. »

C’est dans cette même période que j’ai appris l’incarcération d’un oncle précieux. Je désirais ardemment le rencontrer au parloir et lui parler de l’Amour de Jésus mais je n’en ai pas eu le droit. Je restais donc, dans la voiture, à prier pour le salut de son âme. Ce souvenir ne m’est revenu qu’en effectuant mes premiers pas en centre pénitentiaire. Comment ai-je pu l’occulter ? Lorsqu’il m’est revenu, j’ai senti mon cœur s’élargir et la miséricorde de notre Père me remplir. Son Amour mystérieux et sa grâce compatissante m’ont conquis ! Puis de celle qui était médiatrice et qui écoutait…Je suis devenue celle qui avait besoin d’être écoutée, respectée et aimée. C’est ma meilleure amie, qui a rempli ce rôle ô combien prenant. J’avais tant de fardeaux et de lourdeurs à déposer. C’est avec une patience incroyable et une bonté sans borne qu’elle m’a tendu ses oreilles si actives et bienveillantes.

Un jour, elle m’a partagé son expérience de visiteur à l’hôpital et relaté le rôle fabuleux exercé par une aumônier. A ce moment-là, j’ai senti mon cœur s’enthousiasmer et s’enflammer. Il était devenu fontaine de larmes reconnaissantes et remplies d’espérance. J’ai eu l’intime conviction que j’étais née pour être aumônier. En 2017, j’ai écrit une lettre à mon Sauveur pour lui soumettre ce projet.

En septembre 2018, je suis invitée à me rendre à Paris pour une rencontre de femmes baptises. Le titre m’interpelle immédiatement : « Votre candidature a été retenue ! » Comme j’ai été bouleversée et saisie ce week-end là en écoutant aumônier protestante aux armées, nous témoigner de son appel et de ses missions. J’ai compris que Jésus Christ avait bien retenu ma candidature et me façonnait inlassablement. Il a fallu attendre mon arrivée en Normandie et une disponibilité forcée de l’éducation nationale pour que ce rêve soit ressuscité. Je prie ardemment notre Souverain de me montrer l’église dans laquelle je pourrai offrir mes dons et LE servir. Premier culte : un aumônier prend la parole pour présenter son ministère. Elle n’est pas seule, il y a un autre membre de la même église ! A l’écouter, je fonds en larmes et me sens si minuscule devant la grandeur et l’incroyable clin d’œil de notre Dieu. Très vite, je suis invitée à rejoindre la chorale pour mon premier culte de noël en prison : je m’y sens si zélée, certaine que la Volonté de Dieu est là, dans ce lieu pour moi. J’entre dans ma destinée et résonne cette phrase : « ta candidature a été retenue ! ». Ah comme notre Dieu m’enseigne la patience…vertu indispensable lorsque nous sommes en prison…  Il me faut encore deux années pour cheminer afin d’obtenir mon agrément. Jésus m’encourage tant à travers une poignée de sœurs en Christ et il ôte tout doute, lorsque j’entends cette fois-ci un autre aumônier témoigner de son appel et son parcours. Maintenant, je sais que je suis l’aumônier à la fleur, au service du Seigneur !