Au théâtre de l’Opprimé à Paris s’est joué le spectacle De nos frères blessés inspiré du roman éponyme de Joseph Andras.
Fernand Iveton a été exécuté en 1956 à la suite d’une tentative raté d’un attentat revendiquant l’Indépendance de l’Algérie. Les quatre jeunes comédiens du collectif Satori, mis en scène par Fabrice Henry nous racontent par discours rapportés l’événement et font sonner du verbe les phrases du roman. La démarche et ce désir de partager cette affaire avec le public est sincère. Une adresse simple et vraie nous inclus dans cette représentation et nous prenons part à l’histoire comme si nous y étions. À travers ces mots qui percent, qui sifflent et qui bousculent, chaque détail se savoure et ajoute une épaisseur au récit. La brutalité d’une arrestation, les sensations d’une torture au commissariat, les questionnements existentiels de Fernand dans sa cellule nous parviennent avec une objectivité crue et nous parle du tragique de ces actes dénués d’humanité.
Tout est brûlant dans la vie d’Iveton : autant son feu pour les idéaux du parti communiste français, que son cœur embrasé pour sa femme Hélène. Sans décor, sans fatras, quelques chaises, des projections de journaux aux titres des attentats, des images d’archives aux jaunes saturés, des bouts de papiers, des lettres d’adieux, la force du texte portée par le collectif suffit à elle-même tant et si bien que jouer dans le noir est une occasion de pencher nos oreilles pour apprécier ce qui se dit.
L’ensemble du spectacle est poignant et on reçoit les peines, la dignité, les souffrances, l’espoir, l’amour que porte Iveton dans ses viscères. Seulement, difficile de savoir si la justice a mal fait ou pas son travail, puisque nous entrons dans le contexte de la guerre d’Algérie que par la folie de cette tentative désespérée. Le texte a une couleur revendicatrice et élève en héros, cet homme resté inconnu des mémoires n’ayant reçu pour lui-même aucune gloire. Sa vie a été donné en sacrifice pour l’indépendance de l’Algérie, y a-t-il vraiment contribué ? Difficile de juger la légitimité de ses agissements puisque le spectacle n’apporte pas d’informations sur les tenants et aboutissants de ce conflit géo-politique, on est simplement pris de compassion.